Formes et dimensions

A l’exception de quelques menhirs du nord du département, leur forme est assez peu caractéristique et leur aspect peu remarquable. Très peu de menhirs semblent avoir été dégrossis : seuls ceux de Teurthéville-Hague, de Saint-Pierre-Eglise offrent des faces montrant un travail préparatoire rudimentaire.


Leur hauteur reste en général modeste encore que les plus hauts aient été détruits. Le plus grand, celui de la Pierre-aux-Serpents à Flamanville, disparu, était comparable à celui du Champ Dolent à Dol-de-Bretagne.
Citons par grandeur décroissante et sans garantie pour les monuments disparus, les dimensions suivantes hors sol

* : menhir disparu
mesure de la face la plus longue pour les menhirs couchés

Plus de 5 m :

  • La Pierre-aux-Serpents* (Flamanville) : 8,10 ou 9 m;
  • 3 menhirs proches du dolmen (Flamanville ou Les Pieux) disparu en 1880 * : 5 m.

Entre 3 et 5 m :

  • La Longue Pierre * (Saint-Pierre-Eglise) : 4,20 m;
  • La Grande Pierre (Maupertus) : 4 m;
  • Menhir de la Percaillerie *(ou devise) (Les Pieux) : 4 m;
  • La Longue Pierre *(Carneville) : 4 m;
  • La Pierre-Hue (ou Aigüe) (Longueville) : 3,35 m;
  • La Pierre du Diable (Jullouville) : 3 m;
  • Les Pierres Tournantes (Teurtheville-Hague) : 3 m;
  • La Pierre Plantée (Cosqueville) : 3 m.

Entre 1 et 3 m :

  • La Haute Pierre (Saint-Pierre-Eglise) : 2,90 m;
  • La Pierre à Feu (Saint-Germain-des-Vaux) : 2,50 m;
  • La Grosse Pierre (Saint-Germain-des Vaux) : 2,25 m;
  • La Pierre à l’Homme (Saint-Rémy-des Landes) : 2,20 m;
  • École des filles (menhir (?) inclus dans le mur de l’école (Geffosse) : 2,20 m;
  • Pierres de la Guérinière ( Le Grand Celland) : 2 m;
  • Le Maupas (Tourlaville) : 2 m, 1,90 et 1,10 m;
  • La Pierre des Ruettes (Saint-Malo-de-la Lande) : 1,90 m;
  • La Pierre Butée (Rauville-la-Place) : 1,75 m;
  • La Pierre Dressée (Nègreville) : 1,65 m;
  • Les Devises de Carneville : 0,90 à 0,50 m.

La hauteur enterrée varie habituellement de 1/3 à 1/4 de la hauteur visible. Toutefois, dans certains cas, la partie enfouie peut égaler la partie visible comme pour le menhir de Jullouville (anciennement Bouillon) ou pour l’un des menhirs de Tourlaville dont la longueur totale atteignait 4,60 m. L’orientation initiale réelle des menhirs est rarement connue et n’apporte pas d’information exploitable.

On peut estimer de 30 à 40 le nombre de menhirs connus comme tels dans le département. A notre point de vue, ce nombre est sous-évalué (voir notre remarque en introduction). En effet, la toponymie nous enseigne que certains d’entre eux ont disparu sans laisser de traces : le hameau de la Pierre Butée à Tollevast (près de Cherbourg), le champ des Sept Pierres à Auderville, le champ de la Pierre à Cretteville, la Pierre Plate à Argouges ou à Saint-James, etc…
Aucune fouille récente légale n’a été réalisée au pied d’un menhir. Nous devons donc nous en remettre aux données fournies par les auteurs du siècle dernier, avec toute l’incertitude que cela suppose.

Curieusement, aucun cas de christianisation de menhir n’a été signalé : l’adjonction de symboles chrétiens, l’inclusion de mégalithes dans des enceintes sacrées ne semblent jamais avoir eu lieu dans la Manche.

Seul le menhir de Jullouville parait avoir entrainé la construction à proximité, d’un calvaire qui n’existe plus aujourd’hui, pour rassurer les personnes (des chercheurs de trésor qui fouillaient sous la pierre en 1820 avaient été effrayées par un homme qui voulait les assassiner).

Ce mégalithe, comme d’autres du sud du département, a une forme peu caractéristique : grossièrement parallélépipédique, en granite, il mesure 3 m de haut pour une circonférence de 7 m. Le déplacement du calvaire voisin, dont nous venons de parler, a été l’occasion en 1855 de fouilles menées par la Société d’Archéologie d’Avranches, qui ne trouva rien mais put constater qu’il était enterré de plus de 3 m. La masse d’un tel bloc peut être évalué à près de 114 tonnes.

Autre menhir aux contours incertains, le menhir de la Pierre Aigüe, à la limite des communes de Donville et Longueville, à présent inclus dans une propriété.

Tout aussi difforme, le menhir de la Pierre du Diable ou plus prosaïquement « grosse pierre » de la Pilière à Jullouville, est un gros bloc granitique parallélépipédique, qui dépasse d’environ 1,50m au-dessus du sol. A notre point de vue, c’est sans doute l’un des menhirs les plus douteux et c’est pourtant le seul mégalithe indiqué par un panneau dans toute la région ! Il se situe sur la D106, à la limite des communes du Grand et du Petit Celland. Plus par curiosité que par intérêt scientifique, on pourra faire un détour pour dénicher les mégalithes inclus dans des constructions : Geffosse mais aussi Brainville (lieu-dit Le Bas Brainville : la Pierre du Mélier) près de Coutances. De taille respectable, rien n’indique cependant une relation quelconque avec la préhistoire.

D’autres blocs posent aussi problème : ainsi, la Pierre Bottin, à 2 km à l’est de Cerisy-la-Salle, dresse ses 3,50 m de granite à côté d’une autre dalle horizontale de même dimension. En cela, ces pierres ressemblent fort à la Longue Pierre et à la Table de Carneville.

Plusieurs observations peuvent être formulées sur les menhirs de la Manche :
En premier lieu, il semble qu’il n’y ait pas eu d’alignement au sens strict du terme. Tout au plus peut-on évoquer des groupes, peu nombreux, comme ceux du Maupas à Tourlaville ou du hameau Bosvy à Nacqueville près desquels fut découverte une urne cinéraire et qui furent détruits à la fin du siècle dernier.
Il en est de même d’éventuels cromlechs signalés à Montaigu-la-Brisette (le « cercle des fées »)  ou à Neufmesnil. Ces descriptions anciennes ne sont pas vérifiables sur le terrain. Il convient donc de rester circonspect à leur égard. Nous mentionnons toutefois le signalement par F. Scuvée d’un possible cromlech à Vasteville, découverte qui reste à confirmer et les cromlechs plus certains de l’île de Chausey (voir rubrique « cromlech »).
En second lieu, aucun menhir de la Manche ne porte de gravure. Le seul cas signalé dans la littérature concerne le menhir de la Grosse Pierre à Saint-Germain-des-Vaux : selon les habitants du début du siècle, la base du mégalithe portait des signes gravés, aujourd’hui effacés et dont nous ignorons la nature.
Quant aux rainures relevées sur la Pierre Plantée de Cosqueville ou de la devise des Pieux, elles sont attribuables à des phénomènes d’érosion naturelle. On retrouve les mêmes traces sur des menhirs bretons.
Enfin, certains menhirs devaient manifestement, dans cette région comme en Bretagne, indiquer aux yeux du passant la présence ou la proximité d’une sépulture. C’est probablement le cas des deux menhirs de Maupertus, la Petite et la Grande Pierre, qui furent élevés près d’un tumulus également disparu. Leur emplacement figure sur la carte d’Etat-major du siècle dernier et se situe dans le périmètre actuel de l’aéroport. L’un de ces menhirs, la Grande Pierre, abattue pendant la seconde guerre mondiale, resté longtemps enfoui,  a été récemment relevé, en limite de l’aéroport de Maupertus. Ce mégalithe n’est donc plus in situ (voir la photo dans la galerie).

Comment ne pas remarquer pour terminer la proximité des menhirs du nord de Saint-Pierre-Eglise et du dolmen de la Trigalle, détruit vers 1820 ? Sur le bas-côté de la route qui joint ces monuments, entre Saint-Pierre et Cosqueville, on peut découvrir le « cul du diable », pierre creusée d’une large cupule vers laquelle il était prudent de jeter un caillou pour conjurer le sort…

Dans la Hague, le menhir de l’Epinette à Vauville, près duquel fut trouvé en 1826 un vase en terre cuite en forme de cruche contenant des centaines de haches en bronze, signalait peut-être un tumulus dans le bois voisin des Hougues; ou bien encore ceux situés entre Vauville et Beaumont-Hague (tous ces tumuli existent encore pour la plupart).

Les menhirs disparus de Carneville et de Flamanville voisinaient aussi sans doute avec des sépultures collectives aujourd’hui disparues.

3 commentaires

  1. Concernant la nature proprement géologique des pierres constituant les mégalithes utilisées à différents usages par les civilisations anciennes, les spécialistes ont-ils envisagé qu’elles puissent être exotiques, et transportées là lors de l’avance et du recul recul des glaciers ?

    • Il n’y a pas eu, à ma connaissance, d’étude spécifique portant sur les mégalithes que l’on pourrait qualifier d’allochtones (étrangers à la région). Il ne fait toutefois guère de doute que certaines roches de grandes dimensions utilisées dans la préhistoire pour la construction des mégalithes ont été transportées sur des distances plus ou moins importantes par les glaciers jusqu’à la dernière glaciation qui s’achève dans notre région vers 10000 ans av. JC.

  2. Bonjour
    Il y a un bloc vertical qui ressemble bien à un menhir dans le hameau de la Roche, à 10 m du lavoir, dans le village d Auderville.
    Cordialement

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